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Une experte met en garde les Québécois contre les risques du halal

Il existerait des risques sanitaires et pour le bien-être des animaux avec cette méthode de production alimentaire

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L'anthropologue française Florence Bergeaud-Blackler, qui publie un nouveau livre sur le halal, était de passage à Montréal en octobre. Photo Agence QMI, JOEL LEMAY Photo Agence QMI, JOEL LEMAY

Au moment où la décision d’une garderie de Québec de ne servir que de la viande halal suscite une controverse, une experte française met en garde notamment contre les risques sanitaires et pour le bien-être des animaux qu’entraîne cette méthode de production alimentaire.

Dans son nouveau livre, Le Djihad par le marché, comment l’islam radical s’empare du marché halal, l’anthropologue Florence Bergeaud-Blackler s’intéresse à ce marché qui pourrait aussi servir la cause des islamistes.

La Dre Bergeaud-Blackler vit en Europe sous escorte policière en raison de menaces de mort la visant. Des militants ont qualifié ses ouvrages d’islamophobes, alors que d’autres ont salué son courage et sa rigueur.

Notre Bureau d’enquête l’a rencontrée lors de son passage à Montréal en octobre.

Vous avez pris connaissance de la controverse entourant une garderie de Québec qui a choisi de servir de la viande 100% halal. Qu’en pensez-vous?

Dans ce dossier, on semble en être arrivé à un consensus parce que ça rend service à une population qui est obligée de manger halal alors que l’autre population, elle, n’est obligée de rien. En réalité, c’est une méconnaissance de la façon dont on produit de la viande halal. [...] Le mode d’abattage halal fait une différence au niveau de la souffrance animale et au niveau sanitaire, comparé au mode conventionnel.

Pouvez-vous décrire en gros les conditions actuelles de production de la viande halal?

Ce n’est pas un rituel traditionnel, c’est un abattage industriel rituel qui a été modernisé et qui n’a pas grand-chose à voir avec le modèle de l’imam qui arriverait dans un champ, qui prendrait soigneusement un agneau dans ses bras pour le tuer délicatement. Ça, c’est un mythe, ça ne se fait pas comme ça.

Pourquoi y a-t-il plus de souffrance?

Parce que le mode d’abattage halal bénéficie d’une dérogation à l’obligation d’étourdir les animaux avant leur saignée. Le mode halal n’est pas obligé d’insensibiliser l’animal avant sa saignée, une mesure imposée aux abattages conventionnels pour que l’animal souffre moins.

Et au niveau sanitaire?

Tous les animaux sont saignés, halal ou non. Il y a une différence au niveau de la technique de saignée: la loi oblige une saignée verticale qui doit laisser intact l’œsophage, ce qui évite les contaminations croisées. [...] L’abattage rituel déroge à cette obligation, il y a logiquement un risque accru de contamination de la viande.

Est-ce que ce risque a déjà été prouvé?

On n’a jamais vraiment prouvé qu’il y avait des empoisonnements liés à ça, c’est très difficile à évaluer dans la mesure où il n’y a pas de traçabilité des viandes rituelles. Mais on a eu des cas récents en France où la suspicion était très forte, des enquêtes sont d’ailleurs en cours.

Comment expliquez-vous que ce sujet ne soit pas mieux documenté?

C’est un peu un sujet tabou. Les vétérinaires qui sont les seuls habilités à dire quelque chose sur le sujet n’ont rien dit. [...] En l’occurrence, c’est très difficile à savoir.

Et les associations de protection des animaux, qu’ont-elles à dire sur le halal?

Les associations de protection animale sont plutôt gênées par l’idée qu’elles pourraient être assimilées à l’extrême droite si elles contestent quoi que ce soit qui ait un rapport avec les musulmans et l’islam. Et donc elles se font discrètes.

Comment ont évolué les demandes reliées au marché halal au fil des années?

Il faut bien comprendre que la séparation alimentaire concerne la question de la commensalité. La commensalité, c’est ce qu’on mange ensemble, c’est la convivialité. Quand j’ai commencé à travailler sur cette question dans les années 1990, il y avait une assez grande tolérance. S’il y avait du porc, on le mettait à côté de l’assiette. Avec la pression des fondamentalistes, et notamment des Frères musulmans, les choses ont changé. Quelqu’un qui ne mange pas halal, quelqu’un qui boit de l’alcool, est considéré comme un mauvais musulman, voire pas du tout un musulman, il est de fait exclu de la communauté.

Que diriez-vous aux Québécois qui ne voient pas de problème avec l’introduction du halal dans des écoles par exemple?

Ils sont mal informés. La plupart des parents ne savent rien de ce sujet. [...] Par contre, s’ils savaient [...] qu’une partie de l’argent [du halal] va aussi à des groupes religieux, si [ils savaient que] le bien-être animal n’est pas respecté, là ça pourrait changer leur opinion.



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